O-shôgatsu お正月 ou le Nouvel An japonais

Rédigé par Jérôme

Shôgatsu signifie «premier mois» (donc «premier mois de l’année») mais aussi «mois du renouvellement». Autrefois basé sur le calendrier lunaire chinois, le Shôgatsu avait lieu au début du Printemps.

Aujourd’hui le calendrier que nous utilisons nous aussi (le calendrier grégorien) a été adopté au Japon et le Nouvel An a lieu le 1er janvier.

C’est une période de congés pour presque tout le monde au Japon du 1er au 5 janvier et l’école est en vacances du 27 décembre au 7 janvier à peu près (administration du 29 au 3). Seuls les commerces restent ouverts durant cette période.

Les coutumes :

Les bonnes résolutions de l’année commencent avant le Nouvel An avec ôsôji, un grand nettoyage de la maison que l’ont fait les derniers jours de décembre.

Il faut que la maison soit propre et pure car il faut accueillir la divinité de l’année, celle-ci vient dans la maison et il faut donc l’accueillir comme il se doit. Ce grand nettoyage fait donc office de purification car les Japonais accordent une grande importance à la purification, très présente dans les croyances Shintô.

Pour accueillir la divinité hormis le grand ménage on décore l’entrée de la maison avec des kadomatsu, (décorations de pins et de bambous) qui sont placés sur le seuil des maisons à l’extérieur et qui ont donc été nettoyées de fond en comble pour accueillir la divinité de l’An. Un shimékazari (cordelette de paille tressée) est suspendu au-dessus de la porte des maisons pour chasser les mauvais esprits et, à l’intérieur de la maison, un kagami mochi, composé de deux gâteaux de riz gluants pilés (mochi) superposés (du plus petit au plus grand, un peu comme la forme d’une stupa) et surmontés d’une orange ou d’une clémentine, vient orner l’autel des ancêtres ou le tokonoma, ou plus simplement décorer la maison. Ce kagami-mochi ne pourra être mangé qu’à partir du 11 janvier, on le partage alors en famille dans un plat de haricots sucrés qu’on appelle oshiruko.

Le Réveillon du 31 décembre s’appelle ômisoka et avant de se coucher on mange assez sobrement des soba (nouilles au sarrasin), signes de longévité car elles sont longues. Par contre dès le lever on mange l’oséchiryôri et le ozôni et on boit le saké.

L’oséchiryôri : comme on ne doit rien faire durant les trois premiers jours de l’année, même pas la cuisine, on prépare des mets avant le 1er qui se mangeront durant cette période. Il s’agit de différents plats qui sont présentés dans des grandes boîtes laquées qui ressemblent à des boîtes à bentô (le fameux casse-croûte japonais) comme ça on peut recevoir les gens qui viennent vous saluer pour la nouvelle année en leur présentant ces plats.

On mange aussi le ozôni, un bouillon que l’on mange traditionnellement avec des baguettes de saule non laquées et qui se compose de mochi (gâteaux de riz gluants pilés), de légumes, de miso (pâte de soja fermenté). À la campagne il est coutume de préparer le mochi en famille en pilant du riz gluant dans un immense mortier en bois à l’aide d’une grosse massue.

Hatsuhinodé à Narita-san dans le département de Chiba

Le 1er janvier (parfois dès minuit) et durant les sept premiers jours de l’année on se rend au temple bouddhiste ou au sanctuaire shintô (bien souvent le plus près dans le quartier où l’on habite). Cette coutume s’appelle Hatsumôdé («première visite»), il s’agit de la première visite et première prière de l’année, elle est donc très symbolique tout comme le premier rayon de soleil de ce jour là (Hatsuhinodé) car dans une tradition japonaise shintô où la déesse principale est Amatérasu, déesse du Soleil, il est coutume de voir le premier soleil de l’année se lever, symbole d’heureuses promesses pour l’année à venir (il y a donc de fortes affluences dans les temples et sanctuaires cette nuit et ce matin là).

Certaines personnes, profitant de l’occasion, viennent en kimono traditionnel. On y boit aussi le premier saké de l’année, amazaké (saké sucré et peu alcoolisé).

On fait une prière soit aux Bouddhas soit aux Kami  (sortes de divinités du Shintô) suivant si l’on est allé faire Hatsumodé au temple bouddhiste ou au sanctuaire shintô.

Hatsumodé au Sensô-ji à Asakusa, Tôkyô

Comment faire sa prière aux Divinités et aux Bouddhas japonais : on sonne des cloches ou on tape sur un gong pour appeler le Kami ou le Bouddha (ainsi on attire son attention) puis on jette des pièces ou des billets dans un coffre à offrandes, ensuite on fait une prière pour exprimer sa reconnaissance et l’on prie pour une année de paix et de bonheur.

Après on peut tirer au sort un omikuji, une divination ou prédiction pour la nouvelle année (et donc elle aussi très symbolique), si c’est celle-ci est mauvaise on l’accroche sur un arbre ou sur des fils tendus exprès pour conjurer cette divination (pour l’annuler).

Omikuji à Chiba-jinja à Chiba

Cette nuit là les temples bouddhistes font retentir leurs cloches 108 fois (pour les 108 péchés de la tradition bouddhique)

On achète aussi une éma, une plaquette de bois sur laquelle figure l’animal de l’année (dans l’astrologie orientale) ou la divinité tutélaire du sanctuaire ou du temple et sur laquelle on inscrit un vœu, un souhait puis que l’on accroche dans un endroit prévu à cet effet.

Des petits stands de nourriture ou de vente de décorations se trouvent aussi tout autour du temple ou du sanctuaire à cette époque. Dans les temples notamment on peut acheter des daruma, des sortes de poupées porte-bonheur en papier mâché, les plus grandes peuvent faire plus d’un mètre de hauteur. On fait un vœu et on dessine une pupille dans l’un des yeux vides du daruma, ensuite on expose le daruma en hauteur sur une étagère. Si le souhait se réalise on dessine alors la seconde pupille. Au delà de l’aspect superstitieux il s’agit davantage d’une réflexion sur la façon d’accomplir ce qui est désiré(réflexion toute bouddhiste car Daruma est en fait un personnage célèbre du Bouddhisme, fondateur de la branche Chan en Chine, devenu le Zen au Japon).

Daruma

À la maison les enfants reçoivent des adultes des otoshidama : sortes d’étrennes données aux enfants par la famille dans des enveloppes décorées et consacrées à cet effet et qui constituent l’argent de poche de l’année.

On profite de ce temps de repos calme pour faire des jeux traditionnels : jeux de cartes(karuta), cerfs-volants (tako), jeu de l’oie japonais (sugoroku), jouets en bois : jeux de raquette (hanétsuki) toupies (koma), bilboquets (kendama)…

On fabrique aussi des mari, boules de tissu enroulées de ficelles qui forment des motifs et qui servaient autrefois à jouer avec le pied (kémari), de nos jours ces boules servent plus de décorations. On écrit (et on répond) aux nengajô (littéralement «carte de félicitations de l’année»), bien souvent on les réalise soi-même, développant son sens créatif par des représentations (image, photo, dessin, calligraphie…) du signe de l’année ou des dessins ou photos de soi-même et de sa famille, des créations plus personnelles (poterie, gravure…). On en reçoit un certain nombre et il faut répondre à chacune (c’est un long travail de début d’année). Il existe des cartes prépayées au bon format et on imprime ensuite dessus ce que l’on veut, chaque famille envoie en moyenne cinquante à cent nengajô.

On s’offre aussi des cadeaux et l’on rend visite à la famille, aux amis…

Le 2 janvier également se pratique la première calligraphie au pinceau (shodô) de l’année appelée kakizomé.

Le rêve fait pendant la nuit du 1er ou du 2 janvier est appelé hatsu yumé et il donne des prédictions pour l’année à venir. Les rêves où apparaissent le mont Fuji, un faucon ou une aubergine sont considérés comme les meilleurs augures.

Les vœux se disent, avant le 31 décembre yoi otoshio («bonne année») et à partir du 1er akémashité omédétô gozaïmasu (littéralement «félicitations à l’aube» de cette nouvelle année).